Yoga driver

Les studios de yoga fleurissent et leurs instructeurs affichent sourire épanoui en lotus le temps d’un selfie. Ainsi, sur son tapis l’élève se surprend à rêver d’un 200 HTTC à Rishikesh ou à Bali. La vocation vient à celui qui, nourri de sa pratique, ressent le besoin de la transmission.

Muni de sa map appli à la recherche du centre ou du Maître qui amènera l’aspirant à la concrétisation du processus de reconversion, la prospection s’avère plutôt difficile. Pléthore de programmes et d’enseignants rivalisent de stratégies et outils de marketing. D’une transmission secrète et ancestrale la formation a pris place sur tous les supports internet. Cette abondance de choix peut créer bien des confusions.

L’émulation est relativement récente et la réglementation assez pauvre.

Techniques actuelles et traditionnelles concourent à sa véracité.

Dans ces conditions, à qui confier la trajectoire de sa professionnalisation ?

Il n’est pas rare de lire « professeur de yoga certifié » à l’entête d’une page Facebook et autres réseaux sociaux. Formé par un Maître inconnu dont le nom rassure à la lecture de sa consonance extrême orientale.

Les yogis 70’s dont l’intention première fût, la mise en commun de leurs compétences dans un souci de formation continue ont, fortuitement, favorisé un système de normalisation. Le certificat de stage pour professeur en voie de perfectionnement est devenu un diplôme reconnu aux regards de ceux qui exercent. La marque est déposée (RYT), à proximité du qualificatif siège le quantitatif « le 200/500 Heures Teacher, Training, Course » PASS pour le recrutement dans les centres de yoga du monde.

Les écoles occidentales dont la notoriété est acquise, ont diversifié leurs activités vers le marché de la formation. L’ex animateur expérimenté s’est vu proposé au rôle de formateur. Programmes et contenus improvisés se sont peu à peu affinés.

La marchandisation de l’instruction du yoga n’a pas échappé aux centres et ashrams de l’Inde. L’impératif temps à été pallié par l’enseignement accéléré sur 1 mois ou 2. Au rythme de 12h/jour les leçons sont ingérées, le programme se clôture par une cérémonie de remise d’un diplôme où tous réussissent.

Le succès grandissant a poussé, un certain nombre d’enseignants soucieux de garder la position émérite de leurs prédécesseurs, à rejeter ce type format.

Le protectionnisme est le mécanisme adopté par les successeurs des Maîtres indiens fondateurs. Brevets protégés, critères de sélection, d’évaluation hiérarchisés délimite le champ de compétences de leurs instructeurs (niveau 1,2, 3…. Master). La fidélité est l’enseignement, la pédagogie méthodique, la validation nullement un acquis.

Pas de confusions de style, l’apprentissage est uniforme. Pour ce cursus l’admission est sélective. Elle nécessite plusieurs années de pratique et de présence au shala. Le parcours n’en est pour autant pas à sa clôture, la certification n’évolue que par la régularité des visites auprès du « Guru » officiel.

Quelque soit la dynamique, l’une et l’autre revendique sa part d’authenticité quant à l’apprentissage et la formation.

La pluriactivité du non conformisme côtoie l’uniformité des gardiens du savoir hérité.

Le yoga millénaire discipline à transmission pas si secrète aurait très bien pu dépérir. Pourtant, il se théorise à l’université, s’actualise sur un écran, se pixelise sur les réseaux, se professionnalise à Mysore, Pune ou à Paris.

Heureux sont ses acteurs qui, au fil des siècles, l’ont immortalisé, sur une appli, par un selfie, mine réjouie et leggings fleuris.

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